lundi 28 février 2011

Parfaitement duel et duo parfait

" Comment ça va ? "
Cette "question" - qui régulièrement n'en est pas une - a eu durant des décennies le pouvoir de me plonger dans un douloureux désarroi.

Alors même que j'avais bien entendu et compris que pour certains cette phrase fonctionne comme une clé de contact ou un brise-glace, une façon légère et "normale" d'entrer en matière et en relation, cette formule - qui, le plus souvent, n'attend pas une réponse vivante, présente, vibrante, mais plutôt une "réponse" formelle - induisait en mon système relationnel un effet déboussolant ; me semblait bloquer ce qui est vivant en moi, en nous ; m'apparaissait me demander d'entrer dans le moule de convenances, d'une certaine politesse convenue que pour ma part je trouve juste peu honnête et prétentieuse dans le sens qu'elle cache la vérité du moment.
Ce rituel, tu l'as compris, m'amène plus à me fermer qu'à m'ouvrir à la beauté du présent, m'incite davantage à me retirer qu'à entrer en relation.

Bref, cette souvent pseudo-question (de même que les innombrables questions et commentaires sur le temps qu'il fait, a fait ou va faire) m'a longtemps plongé - et aïe bobo, je bois parfois encore la tasse - dans un état de malaise.

Puis, pendant des années j'ai répondu : "ça varie" ;
réponse qui avait le don de me convenir parce que la trouvant totalement vraie et intègre ;
et également parce que le plus souvent elle déclenchait un début de commencement d'ébauche d'esquisse d'étonnement, de sourire et qui sait, d'une certaine compréhension ...  "Ah oui, c'est vrai ça !?!"
J'assistais alors, en direct, à la naissance de la philosophie ...


Dès ce jour je m'en vais tenter une autre variation, jouer à dire et redire, répondre et répondre encore par un "parfaitement".

Parfaitement !

Et s'il me semble y avoir l'élan et l'écoute, la place et le temps pour développer un poil davantage, alors et peut-être - selon les ambiances, cas, circonstances, contextes, humeurs, personnes, situations, etc.  - je ferais suivre ce "Parfaitement" par
"(Parfaitement) ... bien"
ou alors ("Parfaitement) ... mal",
ou encore, et et ici classé par ordre alphabétique, par un :
"parfaitement abasourdi", ou "... abattu", ou "... attiré", "bienveillant", confiant", "découragé", "délirant", "dépité", "déprimé", "d'humeur câline", "effrayé", "émerveillé", "émoustillé", "en colère", "ennuyé", "ennuyeux", "enthousiasmé", "étonné", "fâché", "heureux", "joyeux","réfractaire", "résistant", "séduit", "sidéré", "tendre", "triste", etc. etc etc.

Le point étant que tout cela - chacun de ces sentiments et émotions - est parfait,
parfaitement acceptable, parfaitement incroyable, parfaitement insignifiant, parfaitement paradoxal, parfaitement plausible, parfaitement plus ou moins drôle, parfaitement signifiant, parfaitement vain, parfaitement valable. Parfaitement vivant.

Parfaitement !

Et toi, comment ça va, maintenant même ?